♦ Est-ce que les écrits restent ?
♦ L’amour avec un grand A existe-t-il ?
♦ Faut-il tenir sa langue ?
• Est-ce que les écrits restent ?
• L’amour avec un grand A existe-t-il ?
• Faut-il tenir sa langue ?
L’adage de la semaine…
« La douceur de la lumière, ce petit parfum dans l’air, la rumeur tranquille de la ville. J’inspire profondément car ma vie me paraît alors si simple qu’un élan d’amour me donne tout à coup envie d’aider l’humanité tout entière »
— Le Fabuleux Destin d’Amélie Poulain – Film de Jean-Pierre Jeunet.
♦ L’EXPÉRIENCE HEBDOMADAIRE DE PROFONDE BONNE HUMEUR
« VIENS… ÇA VA DÉCLENCHER LES ÉVÉNEMENTS ! »
Aller à l’école buissonnière de l’orée des bois
• Prologue
Laissez-moi vous narrer les faits. Tout s’est passé en cette fin d’année : le jeudi.
Quelques heures avant que cette année ne soit enterrée dans la fosse commune,
sans cotillons ni trompette. Sans regret. Pourtant, un événement biscornu est survenu.
• Pris sur le vif
Ce jeudi-là, 31 décembre de la fameuse année 2020, vers la fin d’après-midi, après des jours et des jours de pluie et de temps brouillassant, un soleil bleuté est venu percer les amas des nuages lugubres. Une gloire s’est mise à jouer dans un ciel ahuri comme pour nous prévenir :
– « Attention, quelque chose de nouveau va advenir ! »
Parfois, il y a une sorte d’étrange pressentiment qui vibre dans l’air avant d’être confirmé par la suite. Le moment est arrivé, mais qui le sait ? Mes doigts de pieds sont toujours les premiers à être informés. Ils répondent à des appels impérieux qu’ils sont les seuls à entendre. Ils doivent soudain envoyer tout balader.
J’enfile donc promptement mes bottes. Je saisis un gilet fluo, un accoutrement suffisamment criard pour que les chasseurs du coin me fournissent un laissez-passer car je ne suis pas un gibier ordinaire. Je fais même partie des espèces protégées.
• Reprenons le cours de cette histoire de consentement du 1er de l’an
Donc, au crépuscule de ce dernier jour de l’année, avant que les derniers rayons de soleil n’aillent se coucher, je me suis entendu dire en aparté :
– « Viens, ça va déclencher les événements ! »
Cette phrase rituelle représentait entre mon père et moi, comme un signe de ralliement que nous nous lancions par défi. Lui, très âgé avec ses 98 ans au compteur, et moi qui n’était pas non plus né de la dernière pluie, nous utilisions cette formule incantatoire avant d’aller faire un tour dans le village à la poursuite des petits hasards la chance, à l’affût des circonstances insolites et à la découverte des belles gens…
Une véritable quête aux opportunités insoupçonnées commençait.
Neuf fois sur dix ça marchait !
Malheureusement, il est décédé avant qu’on n’ait pu expérimenter une dixième tentative. C’est sans lui que, cette fois-ci, je traversais les buissons et les fourrés dans l’idée de maintenir la tradition de cette traque des belles rencontres.
Au début, c’était couru dans ce genre de filature, il ne se passait rien de bien d’extraordinaire. Il est normal que la magie n’opère pas immédiatement. Sinon, ce ne serait plus magique. Il faut insister, sans avoir l’air de trop insister. Toutefois, ce qui est perceptible quand on explore une forêt, c’est l’hypersensibilité dont font preuve les grands et les petits arbres dès lors qu’on les approche avec un peu de respect. Les sous bois, eux-aussi, semblent particulièrement doués. Ils savent d’emblée se rendre complices d’une expédition qui n’a plus rien de punitive, mais qui devient, au fur et à mesure de son avancée, de plus en plus admirative.
Mes pas m’avaient conduit vers de grandes trouées de lumière tamisée dans des prairies proches d’un haut lieu qui s’appelle : la Querrerie. Une ancienne chartreuse couverte de lauzes, un édifice vibrant encore de plusieurs centaines d’années de prières et de quêtes.
Et…
Au beau milieu de ces pénombres, dans un grand espace mordoré,
Il y a…
– « C’est quoi ça ?
Un grand cerf !
Pas possible !!! »
Les cornes déployées en hommage au ciel, sa majesté impassible, bien en terre, se laisse entrapercevoir en ombre chinoise. Face à cet animal sacré, juste placé dans les lumières du couchant, j’adopte immédiatement, comme par réflexe, l’attitude de la grande allégeance qu’imposent les évènements.
Devant l’apparition de ce grand cerf royal, je ne moufte pas. Lui aussi, très curieux, très discrètement… se rapproche, s’immisce, jusqu’à n’être qu’à deux ou trois encablures. Son mufle commence à me flairer subrepticement. Ses yeux me considèrent en silence. Une imperceptible joie s’écoule entre nous, d’âme à âme. Nous sommes plongés dans un élixir de jouvence où s’opère une danse immobile et intense, une douce fulgurance de bénédictions.
L’étrangeté de ce rendez-vous fortuit n’est pas éprouvée sur le coup. Va-t-elle se répercuter peu ou prou les jours suivants jusqu’à ce moment présent où je vous écris ?
• Comme un profond voyage en cœur à cœur
Je ne sais pas ce qui s’est déclaré en quelques instants d’éternité, avant la nuit tombée, mais on ne revient pas indemne de cette sorte de confiance-conscience.
Le cerf s’en est allé comme il était arrivé.
J’ai vu les muscles de son encolure se tendre et se détendre. J’ai éprouvé la magnificence de cet élan couronné par la splendeur du moment. Je suis resté comme abasourdi, plongé dans le mystère des origines de la vie. Le consentement entre toutes les biodiversités, les myriades infinies de coïncidences mises en jeu pour que cette unique expérience ait lieu.
Par ordre d’entrée en scène je citerais :
« le soleil couchant qui a déchiré les nuages, l’envie de déclenchement des événements levée telle une promesse de liberté, les doigts de pieds enthousiastes qui ont réclamé de se mettre en marche, le vœu posthume de mon cher papa qui a réveillé une certaine promesse enfouie, les appels insistants des bois et des sous-bois, accompagnés par une gloire dans le ciel, les buissons écoliers, les arbres enseignants, une chartreuse pleine de prières ancestrales, une vaste et improbable clairière, un cerf magistral… Oui, c’était bien un cerf ! Toute une trame inextricable de vies complices d’autres vies à compléter. La grande orchestration philarmonique universelle à célébrer. Les tissages des corps intriqués, les sensations inouïes et les évocations des mémoires d’oubli… »
Que témoigne ce cerf aux lignes admirables, grandiose, port altier, majesté divine inoubliable, totem impensable ?
Sa large encolure aussi vaste que l’espace, sa tête haut levée et surmontée d’une ramure parfaite, sa double empaumure ample et chevillée à des possibilités inespérées, sa présence effacée dévoilant des signes cabalistiques que seuls les cieux à venir sont capables de décrypter… que nous révèle tout ça ?
Son regard à la fois triste et luisant, frais et mouillé, clarté dormante dans laquelle jaillissent de soudaines étincelles et d’obscures inquiétudes, de quoi nous prévient-il ?
Ce cousin animal souhaite-t-il humer l’humain ?
Flaire-t-il s’il est possible de compter sur nous ?
Est-ce que tous les deux, en association avec bien d’autres survivants, nous consentons encore à aimer la vie ?
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